Covid-19 et non-remboursement des vols annulés
Des agences de voyages ont, sans succès, saisi l’Autorité de la concurrence afin d’obtenir la condamnation de nombreuses compagnies aériennes qui se sont entendues pour ne plus rembourser les vols « secs » annulés en raison de la crise sanitaire.
Il résulte de l’article 8, § 1er, du règlement n° 261/2004 du 11 février 2004 sur les droits des passagers aériens qu’un vol annulé doit, en tout état de cause, être remboursé en espèces dans un délai de sept jours ; les compagnies aériennes ne peuvent opposer au client aucune « circonstance extraordinaire ». Et si un avoir peut être proposé à ce dernier, il ne peut jamais lui être imposé. D’où la saisine de l’Autorité de la concurrence par des agences de voyages qui reprochaient à quatre-vingt-dix compagnies aériennes, membres ou non de l’IATA (l’association regroupant la plupart des compagnies aériennes, à l’exception des low cost), de s’être entendues pour ne plus rembourser les vols « secs » annulés en raison de la crise sanitaire liée au covid-19, réservés par l’intermédiaire des agences. Elles avançaient que, depuis le 17 mars 2020, ces compagnies auraient, de manière coordonnée et sous l’égide de l’IATA, cessé de respecter l’obligation de proposer le remboursement des vols annulés imposée par le règlement précité, en raison de cette crise, et auraient imposé, en lieu et place, des avoirs, au détriment des agences de voyages et de leurs clients. Il y aurait là, selon elles, une pratique anticoncurrentielle, une entente, voire un abus de position dominante collective et un abus de dépendance économique. L’Autorité rejette toutefois leur demande, au motif que les éléments de preuve apportés ne permettent pas de démontrer l’existence d’une forme de concertation entre les compagnies aériennes sur les modalités de remboursement des vols annulés. Il apparaît au contraire que la politique de remboursement de chaque compagnie aérienne a souvent évolué depuis le début de la crise sanitaire, tant dans les modalités de remboursement que dans la forme des avoirs proposés (durée de validité, conditions d’utilisation, etc.). Ainsi, le parallélisme de comportement allégué semble pouvoir s’expliquer par des réactions individuelles autonomes des compagnies aériennes, toutes confrontées au même choc économique majeur engendré par la crise sanitaire.
La pratique dénoncée ne peut donc être qualifiée d’entente. De même, l’Autorité conclut à l’absence d’éléments probants caractérisant un abus de position dominante collective et un abus de dépendance économique. Elle n’exclut pas, cependant, que certaines compagnies aériennes n’aient pas respecté leurs obligations vis-à-vis des passagers, découlant du règlement n° 261/2004, notamment en ce qui concerne leur droit à obtenir le remboursement des vols annulés. Il n’est pas non plus exclu qu’elles aient imposé des avoirs aux passagers. Néanmoins, l’appréciation de la conformité de tels comportements avec le règlement ne relève pas de la compétence de l’Autorité de la concurrence, mais de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), s’agissant des vols au départ ou à destination des aéroports français.
Autorité de la concurrence
Décision n° 20-D-21,
8 déc. 2020
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